Je dois avouer qu’en me relisant, la première partie de mon texte vous paraîtra décourageante, sinistre, voire complètement sans issue. Mais l’ombre ne peut exister sans la présence de la lumière. Je commence!

En effet, vendredi, le 22 février 2019, un premier rapport sur l’état de la biodiversité publié par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) mettait en garde l’humanité du risque de pénurie alimentaire dû à la diminution inquiétante de la biodiversité dans l’agriculture. On y affirmait que:

L’humanité cultive environ 6000 plantes pour se nourrir, mais, en réalité, seules 200 d’entre elles contribuent à remplir son assiette et neuf seulement représentent 66% de toutes les récoltes dans le monde.

Dans cette liste des 9 plantes les plus cultivées, on y retrouve: canne à sucre, maïs, riz, blé, pomme de terre, soya, noix de palme (pour l’huile de palme), betterave sucrière et manioc. Par conséquent, de nombreuses espèces, notamment les pollinisateurs (insectes et animaux), les organismes du sol et les ennemis naturels des « nuisibles » qui contribuent aux services des écosystèmes essentiels sont en déclin du fait de la destruction et de la dégradation des habitats, de la surexploitation, de la pollution et d’autres menaces. On assiste également à un déclin rapide de ces écosystèmes-clés fournissant de nombreux services essentiels à l’alimentation et à l’agriculture tels l’approvisionnement en eau douce, la protection contre les tempêtes, les inondations (et autres dangers) ainsi que la destruction des habitats d’espèces telles que les poissons et les pollinisateurs. La chaîne alimentaire s’écroule. Pour renchérir, d’autres chercheurs comme Francisco Sanchez-Bayo et Kris Wyckhuys, des universités de Sydney et du Queensland, vont publier en avril prochain dans la revue Biological Conservation une vaste synthèse de 73 études confirmant eux aussi cette théorie annoncée de l’insectagéddon » selon laquelle:

à moins que nous ne changions nos façons de produire nos aliments, les insectes auront pris le chemin de l’extinction en quelques décennies.

Est-ce sérieux? Si j’ajoute à cela, sur une touche plus québécoise, tout le tragique relié à cette supposée main-mise de l’industrie des pesticides-herbicides sur le Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) avec le congédiement récent de l’agronome et lanceur d’alertes, Louis Robert et des commentaires de l’ancien ministre de l’agriculture libéral, Pierre Paradis déclarant en 2015 « qu’ils sont encore plus puissants que le gouvernement du Québec« , il y a lieu de vouloir abdiquer, voire se recroqueviller en boule et se boucher les oreilles. Cela semble malheureusement devenu le cas lorsqu’on apprend sur une chaîne de télévision la disparition d’une espèce animale entre deux capsules d’information. Une pensée me traversant l’esprit me disant « on est rendu là ». L’extinction du monde à petites bouchées reléguée à des faits anecdotiques dans une foire d’infodivertisement.

Vous comprenez maintenant pourquoi je vous avertissais du côté sombre de mon texte. Mais alors, pourquoi donner autant d’importance aux problèmes? Pour quelles raisons ne met-on pas autant d’énergie à montrer les solutions? Car elles existent. Dans un monde idéal, j’ajouterai à toutes ces tribunes (téléphoniques, téléjournaux, nouvelles Internet, etc.) une partie égale sinon tout aussi grande aux initiatives permettant de contrer les effets néfastes de cette perte de biodiversité. Pour ne citer qu’un exemple… les sentinelles Slow Food.

Avec plus de 500 Sentinelles réparties dans plus de 60 pays à travers le monde, ces projets visent à soutenir des groupes de producteurs, souvent artisanaux, selon un concept développé en 1999 par Slow Food, à travers l’axe de leur Arche du goût. Les Sentinelles peuvent notamment intervenir pour sauvegarder :

  1. un produit traditionnel en voie de disparition (un produit de l’Arche du Goût) ;
  2. une technique ou une pratique traditionnelle en voie de disparition (pêche, élevage,
    transformation, culture) ;
  3. un paysage rural ou un écosystème en voie de disparition.

Ils soutiennent de manière concrète une ou des productions de qualité en voie d’extinction, protègent des régions et des écosystèmes uniques, réinstaurent des méthodes de fabrication traditionnelle et sauvegardent les races natives ainsi que les variétés végétales locales. Chaque projet implique une communauté de petits producteurs et offre un soutien technique pour améliorer la qualité de la production, identifier de nouveaux points de vente et organiser des échanges avec des producteurs internationaux. Pour le moment, seules deux initiatives sont soutenues au Canada pour protéger le blé « red fife » (en Ontario) et le saumon fumé (à Vancouver). Je sais, c’est peu me direz-vous mais selon moi, il n’existe pas qu’une seule solution-miracle à la perte de notre merveilleuse biodiversité. Il en existe tant mais si peu connues. Peut-être est-il temps de m’abreuver à d’autres sources d’information. De mon côté, je poursuis mon objectif de faire connaître nos merveilleuses plantes alimentaires de notre patrimoine québécois. Et je vous encourage, vous aussi à devenir, à votre manière, une partie de la solution. Vous aimeriez partir ou vous impliquer auprès d’une sentinelle au Québec, téléchargez le document en français préparée à cette fin. Ou encore, contactez Slow Food Montréal pour de plus amples infos pour vous accompagner.