Au début du siècle dernier, les couvertures des catalogues gratuits de la compagnie de semences montréalaise Ewing se distinguaient de ceux de leur époque par leur coloris et leur graphisme; des œuvres d’art en soi. Ce sont probablement les seuls témoins restant de cette entreprise et des gens y ayant œuvré notamment son fondateur William Ewing. Il fait certes parti des premiers bâtisseurs québécois (et canadiens) majeurs du réseau des semenciers de la fin du 19e siècle.
Né en septembre 1843 à Sterling en Écosse, il arrive en 1865 à Montréal où il travailla pendant 4 ans auprès de la pharmacie « Kerry Brothers & Crathern co. » Presbytérien et unilingue anglais, il marie Catherine Kinross Graham (1856-1944) en 1883 ayant elle-même immigré d’Écosse en 1862. Ils eurent 5 enfants dont deux d’entre eux reprirent le flambeau à la mort de leur père (Thomas Graham Ewing et William Ewing).
En 1869, William Ewing (père) fondera avec son frère Archibald, la « Ewing Brothers Seed Merchants ». Sise sur la rue McGill, en face de la place d’Youville, l’entreprise déménagea, à sa 8e année, juste un peu plus loin au 142-146 McGill (coin des rues St-Maurice et St-Henri). Le premier changement de nom surviendra en 1883 après la fin du partenariat entre les deux frères en 1882. William s’associera dès lors avec James Henry Davison et William Graham pour la relancer sous le nom « William Ewing & Company ». Selon le livre « Industries of Canada, city of Montreal » de 1882, on y décrivait les activités commerciales comme:
…importing and growing choice vegetable and flower seeds and do a large business in heavy seeds as clover and timothy and seed grain of all descriptions which find their way to every section of Canada. The house is one of the largest concerns of the kind in the Dominion and sends out each year several millions packages of seeds all of which are recommended as reliable guaranteed to be as represented.
(Traduction libre): Importation d’une variété sans cesse croissante de semences de légumes et de fleurs ainsi que la vente en gros de trèfle, thimothy (une graminée européenne pour pelouse) et céréale de tout type qui trouveront preneur dans toutes les régions du Canada. Cette maison est l’une des plus grosses du genre dans tout le Dominion et elle envoi plusieurs millions de sachets de graines chaque année garanties fiables et recommandables.
Cette information se voit corroborée par une liste de prix de « gros » de 1892 en notre possession où l’on peut y retrouver justement les montants exigés. Par exemple, pour une once (28 grammes) de semences de melon de Montréal cultivées directement sur l’île, on demandait 0.30$; une grosse somme en comparaison à 0.60$ pour une livre (453 grammes) de graines de melon citron (melon pour les conserves).
Dans la préface de son catalogue de 1897 (voir image ci-haute), il explique (nous avons écrit intégralement le texte):
Nous sommes heureux de constater que d’année en année nos affaires ont toujours augmentées en volume. Nous sommes pour ainsi dire les seuls fournisseurs de graines qui aient suppléer le plus grand nombre de Merchands canadiens, Fermiers, Jardiniers et Amateurs depuis 1889 sans interruption. L’exactitude et le soin que nous avons pris à remplir les commandes de nos pratiques, expliquent le succès croissant de nos affaires.
Le journal Le Devoir du jeudi 8 mai 1913 explique que l’un de ses collaborateurs, James Henry Davison, découvre William Ewing à sa résidence montréalaise au 100, rue Sherbrooke, suite à une « syncope du cœur » (arrêt cardiaque) à l’âge de 69 ans. Et c’est à partir du 15 décembre 1913 que la compagnie sera constituée en corporation sous le nom « The William Ewing Co., Limited ». (source: The Gazette 1913-1914, p.1988) jusqu’à sa fermeture en 1963. La transaction, sous forme de vente d’actions, aura exigé un investissement de 250 000$ de la part des acquéreurs (James Henry Davidson, William McWilliam, Catherine Kinross Graham, Thomas Graham Ewing et William Ewing) soit environ 5.5. millions en dollars canadiens d’aujourd’hui. Je lève mon chapeau à cet immigrant parti de rien.
À noter: N’ayant pu obtenir de photographie de l’homme, nous serions reconnaissants aux lecteurs ayant cette information de nous en faire parvenir pour le bénéfice des lectrices et lecteurs.
NOUS TENONS À INFORMER QUE MALGRÉ TOUTES NOS RECHERCHES, LES DATES ET ANNÉES DE NOS SOURCES HISTORIQUES NE CONCORDAIENT PAS TOUJOURS ENTRE ELLES. MÊME SI ELLE SONT, SELON NOUS, TRÈS PROCHES, ELLES DEMEURENT QUAND MÊME APPROXIMATIVES ET NE PEUVENT ÊTRE JUGÉES COMME OFFICIELLES. NOUS AJUSTERONS ET AJOUTERONS LES INFOS AU FUR ET À MESURE DE LEUR CONFIRMATION.
Ma mère a encore un contenant d’épices (canelle) de cette compagnie. Enfin, cela témoigne de l’héritage de d’une époque florissante de Montréal.