Liz Christy en 1973 dans son jardin de Lower Esast side (photo: Donald Loggins)

Liz Christy dans le premier jardin communautaire de Lower East side à New York en 1973 (photo: Donald Loggins)

Il y a quelques années, lors de l’un de nos voyages de vacances familial, nous avions élus domicile aux résidences du Collège St-Paul à Ottawa. Juste au bas de la fenêtre, un immense potager communautaire luxuriant faisait office de bienvenue aux nombreuses familles ethniques qui, comme nous, préféraient un tarif hôtelier super abordable. En le visitant, je me demandais où cette idée avait pris racine.

Pour remonter à la naissance du mouvement des jardins communautaires, il faut reculer au choc pétrolier de 1973 qui suivi le choc monétaire de 1971. Les bourses tombent, le chômage augmente et le dollar américain se voit dévalué. À New York et plus précisément à Houston Bowery, au lieu de les entretenir, certains propriétaires d’immeubles décrépis préfèrent les abandonner à la municipalité. Comme la ville n’a pas les ressources financières et maints édifices menacent de s’écrouler, ils sont rasés par mesure de sécurité. On voit ainsi se multiplier les terrains vagues non entretenus.

C’est donc dans cette atmosphère de plus en plus terne qu’une femme, Liz Christy, décide de réunir des amis pour réagir. Leur but: remettre du vert au cœur de la ville. Le défi paraît colossal.

En effet, les terrains en friches sont grillagés. Comment atteindre cet objectif de reverdissement si on ne peut accéder aux terrains. Qu’auriez-vous fait à leur place? Le groupe eut alors l’idée géniale de créer des « bombes de graines » (“seeds bomb” en anglais). Envoyées ça et là à travers le grillage, l’ingéniosité du système fait en sorte qu’avec la pluie et munies de leur réserve de compost, les plantes (fleurs, légumes, arbres, fines herbes…) poussaient et se resemaient pour repeupler rapidement de manière attrayante un espace à l’abandon.

Par la suite, ils plantèrent des arbres, peignirent du lierre sur les façades pour faire comprendre aux gens l’intérêt de réinsérer de la nature dans l’urbain. Au fil du temps et des actions, le mouvement recruta d’autres adeptes à travers la ville jusqu’à ce qu’ils aient assez d’activistes pour réaliser le premier jardin communautaire de l’histoire. Liz Christy réunit tout le monde sous l’effigie du drapeau des « Green Guerillas ». Le mouvement prit de l’ampleur; ce qui encouragea d’autres personnes de tous les horizons et de tous les âges à travailler ensemble et créer leurs propres jardins communautaires. Les « Green Guerilla » apportait aide et soutien à tous les nouveaux groupes mais la responsabilité revenait aux gens de chacun des quartiers de se rencontrer et de décider des actions à faire.

Début du jardin de Liz Christy (source: nycgovparks.org)

Début du jardin de Liz Christy (source: nycgovparks.org)

En général, les premières bases des jardins se construisaient avec l’aide d’objets récupérés. On estime à 1973 la date du premier jardin communautaire de l’histoire et qui porte depuis 1986 le nom de sa fondatrice : Liz Christy. Situé à l’angle nord est de Houston street et Bowery street dans Manhattan, un loyer symbolique de 1$ par mois avait été exigé par la municipalité avant d’accorder aux « Green guerilla » l’autorisation de replanter cet espace. Après un an de travail et d’embellissement, le mot s’est rapidement passé entre les habitants estomaqués des résultats impressionnants réalisés avec presque rien.

Jardin Liz Christy (photo: greenguerilla.org)

Jardin Liz Christy (photo: greenguerilla.org)

L’emplacement devint rapidement un lieu de rencontre, de cours, et d’expérimentations. Les jardins communautaires se propagèrent à travers la ville. 30 ans plus tard, la ville de New York comptait plus de 1000 jardins communautaires où les habitants cultivaient, plantaient, fêtaient le printemps ou l’Halloween, organisaient des rencontres, festivals, se mariaient, offraient des cours de jardinage et redonnaient aux enfants une autre dimension avec la nature et la nourriture. Certains jardins sont devenus de véritables trésors cachés au sein de la ville et ils produisent près d’une tonne de fruits et légumes par an, d’autres ont même leurs ruches. Et depuis 40 ans, l’idée se propagea à des milliers et des milliers d’autres villes partout dans le monde.

Cependant, le statut de la majorité de ces jardins n’est nullement acquis, laissant planer l’ombre qu’un jour, il pourrait être repris car trop souvent, ils sont enregistrés comme “espaces vacants” par le zonage. C’est pour cette raison que l’association des Green Guerrilla a conservé leur nom « belliqueux »; histoire de ne pas perdre de vue que chaque jardin est un combat contre l’urbanisation!

N’est-ce pas merveilleux qu’une seule personne ait pu en inspirer autant d’autres par le monde et qu’à travers elle le merveilleux ait surgit. Pour une autre histoire de ce genre, lisez notre ancien article intitulé: l’homme qui plantait des pommiers. Vous aussi pouvez faire une différence et qui sait, engendrerez-vous un futur mouvement planétaire.

Jardin de Liz Christy (photo: LIZ CHRISTY COMMUNITY GARDEN)

Jardin de Liz Christy 40 ans plus tard (photo: LIZ CHRISTY COMMUNITY GARDEN)