La bénédiction de la machinerie agricole en 1959 (source: Archives R.S.R)
Il y a plus de 25 ans, mes parents ont inauguré leur nouveau garage de mécanique automobile. Pour l’occasion, ils avaient invité une foule de dignitaires, famille, amis, employés, le président de leur franchise mais aussi le curé du village pour la traditionnelle bénédiction. Adolescent et très peu pratiquant, je me demandais quelle mouche les avaient piqué de bénir les lieux. Il est important de souligner que mes parents faisaient partis de la génération rurale née en début 1930; donc, encore fortement influencé par l’église et ses valeurs.
Pour eux, la bénédiction faisait partie des gestes courants demandés aux ecclésistiques pour protéger non seulement les personnes mais aussi les lieux, les animaux, les événements et aussi les objets comme le fait foi cette image de 1959.
Vous connaissez le mouvement Slow food?
Cette organisation fondée en Italie en 1989 est maintenant établie dans plus de 150 pays à travers le monde, dont plusieurs communautés au Québec.
Au départ, elle a été lancé pour contrer la montée constante du « fast-food », la vie de plus en plus rapide des gens, la diminution de la qualité des aliments, la disparition graduelle des traditions gastronomiques locales, la perte de plaisir de la bonne bouffe et de l’engagement qu’elle crée envers la communauté et son environnement.
En 2008, cette philosophie a inspiré Woody Tasch dans une version « économique » qu’il a intitulé Slow Money.
De fait, il estime qu’aujourd’hui l’argent circule trop rapidement. Les titres d’entreprises sont échangés à des vitesse folles au gré de décisions à court terme. Il propose une alternative pour investir: moins obsédé par le rendement rapide, mais plus soucieux de financer l’économie locale et en particulier l’agriculture.
Le type d’investissement proposé par Woody Tash peut générer « un modeste 3%, peut-être 6% certaines années ». Mais derrière tout ceci réside un « dividende » plus payant: la diversité.
Dans cette période d’agriculture industrielle intensive, où l’on sème la même variété de légume sur d’immenses superficies, où des millions de cochons sont produits avec les mêmes spécifications génétiques, « les petites fermes locales sont l’ultime refuge ». Elles préservent les semences traditionnelles et les espèces rares; elles ré-énergisent le sols avec des matières organiques et contribuent à mettre sur pied des marchés locaux en mettant en lien direct producteurs et consommateurs.
Voici en traduction libre, ses 6 principes:
Ramener l’argent à une échelle terre-à-terre.
Ralentir la circulation de l’argent – pas toute, bien sûr, mais suffisamment. Les entreprises sont trop grosses et la finance est devenue trop complexe.
Le 20e siècle fut l’époque « d’Acheter bas / Vendez haut » tout en remettant les gestes philanthropiques à plus tard. Le 21e siècle sera l’ère du développement du capital construit autour de principes tels la non-violence, la capacité de prise en charge, le soin des autres et ce, adapté à son milieu.
Apprendre à investir en partant du principe que la nourriture, les fermes et la fertilité des sols sont importants. Nous devons relier les investisseurs aux lieux où ils vivent en créant des relations vitales et de nouvelles sources de capitaux pour les petites entreprises alimentaires.
Rendre hommage à la nouvelle génération d’entrepreneurs, de consommateurs et d’investisseurs qui nous montrent la manière de changer l’optique de se « tuer à l’ouvrage » en moyen de « gagner sa vie » (adaptation libre de « Making A Killing to Making a Living »).
Commençons à reconstruire notre économie à partir du sol, en nous demandant:
Que serait le monde si nous investissions 50% de nos actifs dans un rayon de 80 kilomètres de notre lieu de résidence?
Que ferions-nous si une nouvelle génération d’entreprises donnait 50% de ses profits?
Que se passerait-il s’il y avait 50% plus de matière organique dans le sol qu’il y a 50 ans?
Même si cette belle vision relève de l’utopie pour l’instant, des centaines voire des milliers de personnes à travers le monde s’y intéressent. Pour les gens bilingues, nous avons inclus une entrevue (30 minutes en anglais seulement) de Woody Tasch expliquant son concept.
Marier l’art contemporain et les semences ancestrales… québécoises de surcroît, est-ce possible?
Et bien c’est ce que les membres de l’atelier Barda ont fait en prenant le pari de suggérer une installation aux Jardins de Métis pour leur 14e festival de jardins, « l’un des principaux festivals de jardins à l’échelle mondiale« . Des 290 projets en compétition en provenance de 31 pays et soumis par pas moins de 725 architectes-paysagistes, artistes, designers et architectes, « sacré potager » a été l’un des 6 récipiendaires pour représenter un jardin conceptuel. Les créateurs (Patrick Morand, Antonio Di Bacco, Cécile Combelle et Julien Pinard) s’entendent pour décrire « sacré potager » comme un:
Clin d’œil mêlant profane et sacré où des reposoirs en bois évoquent les oratoires au croisement des chemins de campagne. Ceux-ci entraînent les visiteurs du côté de notre patrimoine potager et culinaire. Une invitation à faire une offrande pour encourager le retour des légumes anciens, récents ou autochtones dans nos potagers et sur les étals.
Chacun des proposoirs vous suggèrera une variété d’ici (Haricot héritage doré / Haricot sacré coeur / Rutabaga Fortin / Gourgane petite du lac / Haricot Fortin / Ail des bois / Pois Bouchard / Rutabaga Laurentien / Courge Canada Crookneck et Épinard Norfolk) accompagné de bougies personnalisées. Si jamais vous faites un tour du côté de la Gaspésie cet été, vous pourrez admirer cette oeuvre dès le 12 juin 2013.